l’imaginaire

Posté le 28 novembre 2010

 

L’IMAGINAIRE

(auteur-compositeur Jean-Luc Lecourt, alias Jean-Luc Le Ténia)

accords: fa la# sol do

Je t’attends assis sur le banc, il n’y a presque pas de vent et le feuillage des arbres bouge comme de lentes vagues autour de moi, au loin j’entends des enfants qui s’extasient devant les canards qui sont aussi blasés que s’ils avaient traversé mille guerres, mais c’est peut-être juste parcequ’ils sont idiots, même si j’aurai toujours du mal à accepter ça de la part des oiseaux, avec qui il me semble avoir un contact télépathique, ce sont peut-être des machines, mais ultra-perfectionnées, qui ont ceci de particulier, tout du moins pour la plupart d’entre eux, la faculté de voler dans les airs à la seule force du battement de leurs ailes, et je les vois planer au-dessus de moi, tant de grâce et d’aisance me soulage, ils dessinent pour moi la liberté dans le ciel, et m’avertissent lorsque je cours un danger, ils savent aussi me féliciter ou me réprimander ou tout simplement souligner l’émotion que j’éprouve à un moment de la journée, et les canards si patauds qui ont l’air parfois si idiots, sont aussi mignons que des cochons d’inde, avec leurs bajoues et leur port altier quand ils nagent dans la rivière au bord du parc. Je te vois arriver, traversant le pont de bois, ton regard passe des canards à tes pieds, des arbres à moi, et tu es si belle avec ton manteau, ton écharpe et ton bonnet duquel dépassent tes cheveux bondissant au rythme de tes pas, lorsque tu te penches vers moi pour m’embrasser je sens ton parfum, puis les lèvres légèrement froides, qui ne mettent pas longtemps à se réchauffer, au contact des miennes car maintenant nous nous embrassons sur le banc, serrés l’un contre l’autre, au début nous n’enlevons pas nos gants, et nous nous touchons les doigts, mes gants de cuir caressant tes gants de laine, nous goûtons chacune des sensations qu’il est possible de nous procurer, nous imprimons à jamais chacun des gestes et des mots que nous échangeons, chaque feuille de chaque arbre bouge différemment pour nous, et nous sommes heureux, pour une fois nous n’avons pas d’inquiétude, tout semble parfait et nous sommes en harmonie avec la vie, tu as enlevé tes gants et glissé tes mains dans les poches de mon manteau, nous restons ainsi en silence sans bouger pendant quelques secondes, les brins d’herbes gelés sont à la fois futiles et sacrés, tout comme cet instant à la fois court et infini, et bientôt ce banc sera vide, peut-être même qu’il sera détruit, peut-être même que nous ne nous y serons jamais assis, peut-être même que ce banc n’aura jamais existé, tous comme les canards à cette époque de l’année. Mais allez prouver le contraire de ce que je viens de raconter, le seul fait de penser à quelque chose le fait-il exister? N’avez-vous pas imaginé la scène que je vous décrivais? Et ces images dans vos têtes n’ont-elles pas existées? Moi en tout cas j’ai vécu la scène que je vous ai racontée, ne serait-ce qu’au moment où je l’ai écrite, j’en ai même éprouvé le bonheur et la sérénité que je voulais en dégager, ce que je voulais ainsi vous démontrer, c’est que l’imaginaire existe plus que la réalité, puisqu’il peut être à la fois l’imaginaire et la réalité, maintenant que vous êtes passés de l’autre côté du miroir, je retourne m’asseoir en tailleur sur mon canapé, même si en fait je n’ai jamais cessé d’y être assis, et que des fourmis grouillent dans mes pieds. Maintenant je vous dis: « à demain », et que vos souvenirs soient aussi beaux que les miens.


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